Stadifier l’excès de poids à l’aide d’un outil belge
PRATIQUE - Beaucoup de choses bougent dans le domaine de l'obésité. La “nouvelle” définition [1] met moins l'accent sur l'IMC en tant que tel que sur la présence de graisse viscérale et son impact sur les organes et les tissus, précurseur possible de complications. Afin de mieux orienter le plan de traitement, on distingue l'obésité préclinique de l'obésité clinique. Comment cela se traduit-il dans la pratique ?
Le Pr Bart Van der Schueren est endocrinologue à la Clinique de l'obésité de l'UZ Leuven et président de l'Association belge pour l'étude de l'obésité (BASO). Dans le cadre de cette édition thématique sur l’obésité et le diabète, il est heureux de fournir quelques explications.
Quels changements l'article de consensus paru dans The Lancet [1] a-t-il entraînés ou non, et quels paramètres de santé sont essentiels pour évaluer l'obésité ? Le spécialiste de l'obésité insiste particulièrement sur la ‘stadification’ du surpoids et de l’obésité. À la demande du corps médical, la BASO a élaboré une guideline belge afin de mieux quantifier le système existant ‘Edmonton Obesity Staging System’ (EOSS). Il s'agit du score EOSS-BOSS [2] – BOSS pour ‘Belgian Obesity Staging System’. « Ce n'est qu'en procédant à une stadification que nous pouvons nous assurer que les nouveaux outils tels que les analogues du GLP-1 atteignent la bonne population de patients », soutient le Pr Van der Schueren.
Commencer par l’IMC
Un premier message important est que l'indice de masse corporelle (IMC) n'est pas soudainement devenu obsolète. Le fait que l'IMC ne reflète pas toujours avec précision l'état de santé n’a rien de nouveau. Un bodybuilder avec un IMC de 32 ne doit pas faire de régime, tandis qu’une personne avec un IMC de 27 et des facteurs de risque, tels qu'un mode de vie sédentaire, peut avoir un risque cardiovasculaire très élevé. « L'IMC n'est pas bien corrélé avec la survie. Il est nécessaire de compléter cet indice et de stadifier le surpoids. Mais, et c'est un point crucial, il reste le paramètre le plus accessible. Cela reste notre point de départ », insiste Bart Van der Schueren.
Une étude à grande échelle portant sur quelque 100.000 dossiers de médecins généralistes belges [3] montre que l'IMC est absent des trois quarts des DMG. « Si nous ne calculons pas l'IMC, nous ne mesurons pas non plus le périmètre abdominal, et nous ne prescrivons pas d'examens plus poussés de la composition corporelle, tels que le scanner DEXA ou l'IRM », note le Pr Van der Schueren. Tout commence donc par l'IMC. « C'est une bonne première étape pour soulever la question du surpoids, et voir ensuite quels patients ont besoin d'aide pour contrôler leur poids. »
Impact
La présence excessive de graisse n'est pas un problème médical chez tout le monde. Il faut évaluer la localisation et les conséquences de cette accumulation de graisse. C'est là qu'intervient le score EOSS-BOSS [2]. Il combine les données anthropométriques (taille, poids, circonférence abdominale, etc.) et l'impact fonctionnel de l'excès de poids sur l'organisme. Il s'agit de l'impact sur le métabolisme du glucose, le système cardiovasculaire, les fonctions rénales et hépatiques, le système musculo-squelettique, la santé mentale et le fonctionnement quotidien.
« Plutôt qu'un DEXA scan, nous avons d'abord besoin d'une anamnèse ciblée, d'un examen clinique et d'une prise de sang », souligne le Pr Van der Schueren. « Nous procédons à une stadification chez les personnes dont l'IMC est ≥25 kg/m2 ou dont le rapport tour de taille/taille (périmètre abdominal divisé par la taille du corps, en cm) est ≥0,5. »
« Plutôt qu'un DEXA scan, nous avons d'abord besoin d'une anamnèse ciblée, d'un examen clinique et d'une prise de sang. »
Approche à plusieurs niveaux
Depuis 2011, nous pouvons utiliser le système de stadification de l'obésité d'Edmonton (EOSS). Mais comme il y a eu débat sur certaines valeurs seuils et que le score pourrait être plus convivial, la BASO donne désormais la priorité au score EOSS-BOSS. « Il s'agit d'un outil objectif qui permet de compléter l'EOSS. EOSS-BOSS distingue plus précisément les différents stades de l'obésité et tient compte des connaissances scientifiques acquises début 2025 », explique le spécialiste.
Tout comme le score EOSS, le score EOSS-BOSS répartit les personnes en cinq catégories. « EOSS-BOSS 0 et EOSS-BOSS 1 sont les stades précliniques, des catégories qui ne subissent pas (encore) les répercussions de l'obésité. Ce sont des personnes à qui l'on peut donner des conseils hygiéno-diététiques, au besoin, mais que l'on peut surtout rassurer », souligne le Pr Van der Schueren. Notamment parce que le score EOSS-BOSS utilise le SCORE2 cardiovasculaire [4], nettement plus de personnes se retrouvent dans la classe la plus basse, ce qui est positif : « La démédicalisation est également importante. »
Les scores EOSS-BOSS 2 à 4 correspondent aux stades cliniques de l'obésité, de ‘clinique précoce’ à ‘clinique tardive’. Les personnes appartenant aux catégories supérieures doivent être suivies de plus près et bénéficier des conseils d'un diététicien et/ou d'un coach en activité motrice. Lorsque les mesures de première ligne ne suffisent pas à contrôler le poids, une consultation dans une clinique de l'obésité s'impose, afin de déterminer si un soutien pharmacologique ou une éventuelle chirurgie bariatrique sont appropriés. « C'est là que nous devons médicaliser pour éviter des problèmes plus graves », souligne l’endocrinologue. Pour lutter efficacement contre la pandémie d'obésité, nous devons donc nous appuyer sur les différentes lignes de notre système de santé.
Abandonner les clichés
Le surpoids et l'obésité sont encore largement stigmatisés. Les patients reçoivent un discours culpabilisant, ou on leur dit qu’il faut “faire un peu plus d'exercice et manger un peu moins”. Nous partons du principe que toute personne en surpoids ne fait pas de sport. « Nous devons nous débarrasser de tous ces clichés. L'obésité est une maladie chronique, dont l’origine est complexe et multifactorielle et qui, en fonction de son stade, nécessite un traitement d'intensité différente. Il faut éviter les sarcasmes et fournir des outils aux patients. Et des outils, il y en a ! Nous pouvons traiter la maladie bien plus efficacement qu'avant », ajoute l'endocrinologue avec optimisme.
Les pénuries que nous avons connues pour les analogues du GLP-1 (tels que le semaglutide et le liraglutide) et les twincrétines (telles que le tirzepatide) appartiennent heureusement au passé, et ces médicaments peuvent à nouveau être prescrits plus largement. « Compte tenu de la fréquence et de l'augmentation de l'obésité, ces médicaments deviendront des médicaments de première ligne », suppose le spécialiste. « La stadification est donc très importante pour cibler l’utilisation de ces médicaments », conclut Bart Van der Schueren.
Notes et références
1. Rubino F, et al. Definition and diagnostic criteria of clinical obesity. Lancet Diabetes & Endocrinology (Jan, 2025). DOI: 10.1016/S2213-8587(24)00316-4
2. https://belgium.easo.org/diagnosis-and-staging-of-overweight-and-obesity/
3. https://www.intego.be/onderzoek
4. Algorithme de la Société européenne de cardiologie évaluant le risque de maladie cardiovasculaire à dix ans.
Consultez le score EOSS-BOSS en ligne :
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