ATG et vérapamil, deux candidats au rôle de modificateur du DT1
L’immunothérapie est un domaine thérapeutique qui a bien le vent en poupe actuellement, y compris dans le diabète de type 1, avec l’espoir de retarder l’apparition clinique de la maladie. Parmi les agents actifs déjà connus, on compte les globulines antithymocytes (ATG) de lapin, qui peuvent induire une déplétion lymphocytaire T. Des études pilotes et cliniques suggèrent que l’ATG pourrait être efficace dans le diabète de type 1.

À l’occasion d’un exposé donné le 19 septembre dans le cadre du congrès 2025 de l’EASD ainsi que dans un article publié dans The Lancet [1], la Pre Chantal Mathieu et ses collègues du réseau INNODIA ont rapporté les données à 12 mois de l’étude randomisée de phase 2 MELD-ATG, qui visait à déterminer la dose minimale efficace d’ATG afin de préserver la fonction des cellules bêta dans le diabète de type 1 d’apparition récente (stade 3).
La dose minimale est particulièrement importante à déterminer dans le cas de l’ATG car s’il retarde la progression de la perte de cellules bêta, c’est au prix d’un risque relativement élevé de maladie sérique ou de syndrome de libération de cytokines.
Une étude réalisée chez des diabétiques (très) jeunes
MELD-ATG était une étude contrôlée par placebo, réalisée dans 14 centres accrédités de huit pays, dont la Belgique. Tous les centres faisaient partie du consortium INNODIA IHI, financé par l’Innovative Initiative 2 Joint Undertaking, et cette étude était sponsorisée notamment par l’UZ Leuven. Des participants âgés d'entre 5 et 25 ans, diagnostiqués porteurs d’un diabète de type 1 clinique de stade 3 entre trois et neuf semaines avant le traitement, avec des taux de peptide C ≥ 0,2 nmol/L et au moins un auto-anticorps lié au diabète (GADA, IA-2A ou ZnT8), ont été assignés au hasard dans sept cohortes consécutives, recevant un placebo, 2,5 mg/kg d’ATG, 1,5 mg/kg d’ATG, 0,5 mg/kg d’ATG ou 0,1 mg/kg d’ATG.
Les cohortes étaient stratifiées selon l’âge, et l’ATG était administré par perfusion IV sur deux jours consécutifs. Le critère principal était la surface sous la courbe (AUC) du peptide C stimulé par un repas test, mesuré deux heures plus tard, sous la forme du ln(AUC peptide C + 1). Quelque 117 patients ont été randomisés, dont 46 % de sexe masculin, avec un âge médian de 13,0 ans, une durée médiane de diabète de 51 jours, un taux moyen d’HbA1c de 7,79 % et une AUC médiane du peptide C stimulé de 0,82 nmol/L/min. Les doses de 0,1 mg/kg et de 1,5 mg/kg ont été progressivement abandonnées au cours de l’étude.
Une efficacité importante dès 0,5 mg/kg
À 12 mois, la moyenne de ln(AUC C-peptide + 1) était de 0,411 nmol/L/min (écart-type : 0,032) dans le groupe placebo, et de 0,535 nmol/L/min (écart-type : 0,032) dans le groupe ATG 2,5 mg/kg, soit une différence moyenne ajustée de 0,124 nmol/L/min (IC 95 % : 0,043-0,205 ; p = 0,0028). À 12 mois, la moyenne de ln(AUC C-peptide + 1) dans le groupe 0,5 mg/kg ATG était de 0,513 nmol/L/min (écart-type : 0,032), avec une différence ajustée par rapport au placebo de 0,102 nmol/L/min (IC 95 % : 0,021-0,183 ; p = 0,014).
« L’administration d’ATG à 0,5 mg/kg signifierait qu’une seule perfusion en une journée serait nécessaire, et cette stratégie thérapeutique est disponible et très bon marché dans la plupart des pays. »
Un syndrome de libération de cytokines est survenu chez 11 (33 %) des 33 participants du groupe 2,5 mg/kg d’ATG, chez huit (24 %) des 34 participants du groupe 0,5 mg/kg d’ATG, et chez aucun participant du groupe placebo. Une maladie sérique est survenue chez 27 (82 %) participants du groupe 2,5 mg/kg d’ATG, chez 11 (32 %) du groupe 0,5 mg/kg d’ATG, et aucun dans le groupe placebo. Il n’y a eu aucun décès lié à des effets indésirables.
Pour les auteurs, « surtout chez les plus jeunes, la dose de 0,5 mg/kg était efficace, avec un bon profil de sécurité, et serait donc la dose à recommander ». Ils ajoutent que « l’administration d’ATG à 0,5 mg/kg signifierait également qu’une seule perfusion en une journée serait nécessaire, et cette stratégie thérapeutique est disponible et très bon marché dans la plupart des pays. »
L’étude Ver-A-T1D : pas nécessairement un échec
Utilisé depuis plus de 40 ans dans l’HTA et l’arythmie, le vérapamil freine également l’activité TXNIP, un régulateur redox cellulaire dont la déficience favorise la survie des cellules bêta et prévient le diabète chez la souris. Dans le diabète diagnostiqué récemment, le vérapamil a montré, chez l’adulte, une protection des cellules bêta. Chez l’enfant, une étude randomisée a montré une préservation du taux de peptide C en comparaison avec le placebo.
L’étude Ver-A-T1D, qui avait pour objectif de déterminer l’effet du vérapamil à libération prolongée (SR) chez des adultes récemment diagnostiqués porteurs d’un diabète de type 1, a été présentée au congrès par le Pr Thomas Pieber (Université de médecine de Graz, Autriche).
Réalisée dans six pays dont la Belgique, l’étude Ver-A-T1D visait plus précisément à évaluer l’effet de 360 mg de vérapamil SR administré en une dose journalière dans une telle population de patients, et plus précisément sur la préservation de la fonction bêta. L’évaluation s’est faite au moyen de la réponse peptide C stimulée au cours des deux premières heures suivant un repas test (MMTT), au début de l’étude et 12 mois plus tard, ainsi que du taux d’HbA1c, de la dose quotidienne totale d’insuline et de la durée de glycémie maintenue sous contrôle.
Des résultats a priori mitigés, mais...
L’étude incluait 136 patients, dont 68 % d’hommes (âge moyen 29 ans, IMC moyen 24). Le taux de peptide C, la dose quotidienne totale d’insuline et la durée de glycémie sous contrôle n’ont pas baissé significativement au cours des douze mois, à l’inverse du taux d’HbA1c au cours des six premiers mois. La tendance à la baisse du taux de peptide C était cependant bien réelle (p = 0.06), et plus encore en analyse per protocole (p = 0,034).
Les auteurs estiment que cette étude réalisée chez des adultes manquait de puissance pour démontrer ou infirmer une différence clinique importante minime (MCID) et des résultats positifs comparables à ceux d’études antérieures sur le vérapamil.
Alors, verre à moitié vide ou à moitié plein ? Difficile de répondre à cette question, pour Thomas Pieper, qui rappelle en tout cas que le vérapamil est un produit bon marché, non immunosuppresseur et qu’il est simple à combiner avec des interventions immunologiques à visée modulatrice. À suivre à 24 mois, dans une extension de l’étude.
Référence
1. Mathieu C, Wych J, Hendriks AEJ, Van Ryckeghem L, Tree T, Chmura P et al. Minimum effective low dose of antithymocyte globulin in people aged 5-25 years with recent-onset stage 3 type 1 diabetes (MELD-ATG): a phase 2, multicentre, double-blind, randomised, placebo-controlled, adaptive dose-ranging trial. Lancet. 2025 Sep 18:S0140-6736(25)01674-5. doi: 10.1016/S0140-6736(25)01674-5