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Coupes budgétaires de l'USAID : un désastre sanitaire et humanitaire annoncé

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Les coupes budgétaires de l'USAID (lire également cet article), décidées par l'administration Trump, risquent de provoquer une crise sanitaire mondiale sans précédent. Selon des mémos internes obtenus par l'agence de presse Reuters et relayées par le New York Times et Politico, les conséquences pourraient être catastrophiques : millions de cas de paludisme en plus, explosion des infections au VIH, et paralysie de 200.000 enfants chaque année à cause de la poliomyélite.

Nicholas Enrich, administrateur adjoint par intérim pour la santé mondiale à l'USAID, détaille dans ces documents les projections catastrophiques liées à ces restrictions :

• Jusqu'à 18 millions de cas supplémentaires de paludisme par an et 166.000 décès évitables ;

• 200.000 enfants paralysés chaque année par la poliomyélite, avec des centaines de millions d'infections potentielles ;

• Un million d'enfants privés de traitement contre la malnutrition aiguë sévère, souvent fatale ;

• 28.000 nouveaux cas de maladies infectieuses comme Ebola et Marburg chaque année.

À ces risques s'ajoutent une hausse de la mortalité maternelle et infantile dans 48 pays, une augmentation de 30 % de la tuberculose résistante aux médicaments, et des épidémies incontrôlées de mpox et de grippe aviaire, pouvant toucher jusqu'à 105 millions de personnes aux États-Unis, rapporte le New York Times.

Une gestion politisée et opaque

Depuis janvier, l'administration Trump a suspendu des milliards de dollars destinés à l'aide humanitaire, malgré une dérogation accordée par le secrétaire d'État Marco Rubio fin janvier. Mais, comme le note Politico, "très peu d'argent a été débloqué, mettant en pause les programmes et forçant des milliers d'ONG à licencier".

Le 28 février, la situation s'est encore aggravée avec l'annulation brutale de 5.800 projets financés par l'USAID. Parmi eux, des initiatives cruciales pour la santé maternelle et infantile, ainsi que des programmes de lutte contre la tuberculose.

Moins de 30 minutes après avoir diffusé cette note, Nicholas Enrich a informé son équipe qu'il avait été placé en congé administratif avec effet immédiat. Selon une source proche du dossier, cette décision avait été prise quelques jours auparavant, mais sa mise en oeuvre a coïncidé avec la diffusion de sa note critique. L'homme dénonce une obstruction politique : "Il était clair que nous n'allions pas pouvoir mettre en oeuvre l'aide humanitaire sous cette dérogation", confie-t-il à Reuters, mentionnant divers blocages, comme la suppression des systèmes de paiement des aides ou des directives fluctuantes sur les activités considérées comme "vitales". Le nombre d'employés affectés à la santé mondiale à l'USAID a également chuté de 783 en janvier à moins de 70 en mars.

Un impact aux Etats-Unis, mais pas seulement

Ce changement politique aura des répercussions majeures sur plusieurs programmes de santé mondiale essentiels. Il menace notamment les traitements contre le VIH, privant des millions de patients d'un accès aux soins vitaux. Le contrôle du paludisme en Afrique, où la maladie reste l'une des principales causes de mortalité infantile, risque également de s'effondrer. Par ailleurs, les efforts d'éradication de la poliomyélite, déjà fragiles, pourraient être sérieusement compromis. D'autres programmes, tels que la distribution de médicaments contre les maladies tropicales négligées - incluant le trachome, la filariose lymphatique, la schistosomiase et l'onchocercose - sont également en péril. Enfin, en Ouganda, un projet clé de lutte contre Ebola visant à retracer les contacts des personnes infectées, à surveiller la propagation du virus et à assurer des enterrements dignes pour les victimes, pourrait être abandonné, augmentant le risque d'une nouvelle flambée épidémique.

Matthew Kavanagh, directeur du Georgetown University Center for Global Health Policy and Politics, avertit Reuters: "À moins d'un revirement, cela coûtera des millions de vies, selon les propres estimations du gouvernement."

Si ces coupes budgétaires touchent en priorité les pays en développement, elles risquent également d'avoir un impact direct aux États-Unis (et ailleurs). La fin du financement des programmes de lutte contre la tuberculose résistante pourrait entraîner une recrudescence des cas sur le sol américain. Chaque patient atteint de tuberculose multi-résistante coûte 154.000 dollars en soins hospitaliers aux États-Unis rapporte le New York Times.

De plus, la fin des efforts pour contenir Ebola en Ouganda pourrait réintroduire le virus dans des pays occidentaux. En 2014, un seul patient atteint d'Ebola à New York a coûté 4,3 millions de dollars aux autorités sanitaires locales.

À ce stade, l'administration Trump ne répond pas aux critiques. Ni elle, ni l'USAID n'ont publié de déclarations officielles concernant ces coupes budgétaires. Les demandes de commentaires adressées au département d'État et au Département de l'efficacité gouvernementale (Doge) sont restées sans réponse. De son côté, la communauté internationale s'inquiète d'un retour de maladies autrefois sous contrôle. "Nous nous dirigeons vers un désastre", conclut un haut fonctionnaire sous couvert d'anonymat dans Politico. Reste à voir si cette décision sera contestée au Congrès ou si la communauté internationale tentera de combler ce vide humanitaire.

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Écrit par Laurent Zanella3 mars 2025

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