Fertilité

Vers un registre européen des donneurs ?

Le nombre d'enfants conçus avec le sperme potentiellement cancérigène grimpe à 197

On sait désormais que 197 enfants, dans 14 pays d'Europe, ont été conçus avec le sperme du donneur danois porteur de la mutation du gène TP53, augmentant fortement le risque, pour sa descendance, de développer un cancer. C'est ce que révèle une enquête menée par le Réseau de Journalisme d'Investigation de l'UER, dont font partie la RTBF et la VRT. Plusieurs enfants issus de ces dons seraient déjà décédés...

banque sperme ESB
La banque de sperme incriminée est basée au Danemark.

Le scandale avait éclaté en mai dernier. Chez nous, 11 des 33 centres de fertilité du Royaume sont concernés: 53 enfants, au sein de 38 familles, ont été conçus avec le sperme de ce donneur anonyme numéroté "7069".

Au niveau international, l'affaire concerne 14 pays et 67 cliniques. Au moins 197 enfants ont ainsi été conçus avec le sperme du donneur "7069". 

Au Danemark, on sait que 99 enfants ont été conçus et en Espagne, 35. Mais il est possible que le nombre d'enfants soit encore plus élevé, car cinq pays refusent de divulguer des informations sur le nombre d'enfants nés à partir du sperme du donneur.

LIRE PAR AILLEURS : Le scandale des donneurs de sperme prend de l'ampleur

Le donneur anonyme avait été identifié en novembre 2023 par l'European Sperm Bank (ESB), basée à Copenhague (Danemark). Celle-ci avait alors alerté l'Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS).

Dans une réaction à VRT NWS, la banque de sperme reconnaît que les règles ont été enfreintes en Belgique: normalement, maximum six femmes peuvent être inséminées avec le sperme d’un même donneur. Toujours d’après la banque de sperme, cela s’expliquerait par un « manque de rapports de la part des cliniques, des systèmes non robustes et le tourisme de la fertilité » (réaction de la banque à lire ici).

La Belgique en faveur d'un registre des donneurs
Il n’existe actuellement aucune limite européenne quant au nombre d’enfants ou de familles par donneur... Selon Frank Vandenbroucke, la Belgique et les Pays-Bas plaident depuis 2023 en faveur d'un registre central des donneurs au niveau européen, avec une règle limitant le nombre de familles bénéficiant d'un même don. "Nous continuons le combat au niveau européen", a assuré le ministre belge ce mercredi.

Le donneur pas malade lui-même

Le donneur danois en question est lui-même en bonne santé. Il ne présente l’anomalie génétique que dans une partie de ses spermatozoïdes. « On ne sait pas exactement quelle est la probabilité que les enfants issus du don héritent de la mutation, mais elle est au maximum de 50% », a expliqué la Pre Wendy van Zelst-Stams, spécialiste en génétique clinique, à la chaîne hollandaise NOS. « S’ils héritent de la mutation, le risque qu’ils développent un cancer est de 80 à 90 %, souvent dès le plus jeune âge. »

Jusqu'à présent, on sait qu’au moins dix enfants issus de ce don ont développé un cancer. « Certains enfants ont eu deux formes différentes de cancer, certains sont décédés en bas âge », selon Edwige Kasper, biologiste française et chercheuse en cancérologie au CHU de Rouen.

Une partie des parents et des enfants n’a toujours pas pu être identifiée ni informée des risques pour leur santé jusuqu'ici: la banque de sperme danoise affirme ne pas pouvoir apporter son aide car cela entrerait en conflit avec la protection de la vie privée du donneur.

Rétroactes du scandale

don de spermeL'ESB a vendu le sperme en question entre 2006 et 2023. En avril 2020, la banque a temporairement cessé sa distribution après qu’un enfant issu du don avait été diagnostiqué d'un cancer. Mais les examens génétiques ne révélant aucune anomalie, le donneur a de nouveau été accepté.

En octobre 2023, deux nouveaux cas de cancer chez des enfants issus du don ont été signalés. Ce n’est qu’après des tests complémentaires qu’il a été établi que le donneur portait une mutation cancérigène dans une partie de son sperme. Il a alors été définitivement exclu, et les cliniques de fertilité ont été informées. À partir de ce moment-là, il revenait aux cliniques de prévenir les différents parents. Or plusieurs parents n’ont pas été informés, ou seulement deux ans plus tard.

Des erreurs ont également été commises chez nous, comme en témoigne une mère française qui était venue dans un hôpital flamand pour son traitement. Ce n’est qu’un an et demi après la découverte de l’anomalie chez le donneur qu’elle a été informée par l’hôpital - soit deux semaines après que le scandale a éclaté dans la presse. « L’hôpital a perdu mon dossier », raconte-t-elle à la NOS. « Nous sommes en 2025, en Europe. Des satellites volent dans l’espace, nous avons l’intelligence artificielle. C’est incroyable qu’on traite quelque chose d’aussi important que la reproduction de manière aussi amateur, incompétente et désinvolte », déplore-t-elle.

L’Autorité danoise de sécurité des patients qualifie d’«inacceptable» le fait que tant de femmes n’aient pas été informées dès 2023, lorsque le sperme a été bloqué. L’autorité souligne toutefois l’existence d’obstacles administratifs : «Certaines cliniques ont déjà fermé, d’autres ont fait faillite. Par conséquent, les informations concernant les mères sont incomplètes.»

Enfin, il s’avère également que des centres de fertilité ont commis des erreurs. Une inspection menée en 2023 dans un centre a permis de révéler qu’une patiente avait reçu du sperme interdit par les règlements car une anomalie génétique avait déjà été détectée chez un enfant conçu avec ce donneur. Ce dernier avait alors été définitivement bloqué dans les systèmes et étiqueté comme « NT » (non transmissible). Son sperme ne devait donc plus être utilisé, ce qui a pourtant eu lieu. Le personnel du centre de fertilité n’était manifestement pas au courant de cette interdiction.

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Écrit par La rédaction10 décembre 2025
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