ULiège
'Compass': un MOOC pour apprendre aux médecins (et aux soignants en général) à prendre soin d'eux
Parce que c'est en prenant soin de soi que l'on peut mieux prendre soin des autres, le département de médecine générale de l'Université de Liège a créé un MOOC (cours virtuel) dédié aux (futurs) médecins pour apprendre à gérer leur stress et leur éviter de se prendre le mur d'un burn out.
Pensé, à l'origine, à destination des étudiants en médecine soumis à un stress intense dès leur concours d'entrée, ce MOOC (Massive Open Online Course, un cours en ligne ouvert à tous) imaginé par l'ULiège s'adresse en réalité également à tous les prestataires de soins en proie au stress, ou à des diffilcultés psychologiques inhérentes à la profession de soignant.
Compass...ion
Hébergé sur la plateforme Fun MOOC de France Université Numérique qui abrite des centaines de cours de tout acabit, le MOOC liégeois s'appelle 'Compass', pour 'COMPrendre et Agir sur le Stress des Soignants'.
Nul besoin de réfléchir longuement pour y voir aussi le terme 'compassion'... Parmi le trio féminin à l'origine de la conception et de la réalisation de ce cours virtuel, on trouve une médecin généraliste en la personne d'Anne-Laure Lenoir, chargée de cours à la faculté de médecine de l'ULiège, Marie Bayot, docteure en psychologie, clinicienne et chercheuse elle aussi au sein de la faculté de médecine, et enfin Céline Tonus, technopédagogue à la cellule MOOC de l'unif.
La charge de travail importante tout au long du cursus universitaire, la culpabilité à la moindre activité de loisir, la pression d'être toujours parmi les meilleur(e)s et les sessions d'examens... toutes trois connaissent ! Les deux premières ont ensuite découvert le face à face avec les patients, dont la maladie peut avoir un impact psychologique non négligeable sur le soignant, et vient heurter de plein fouet l'image (surannée) du médecin qui n'a pas le droit d'être faillible, ni même d'exprimer ses émotions.
« Or, la vulnérabilité face au stress est normale, elle n'est pas un signe de faiblesse », rappelle la Dre Lenoir. « Elle doit être apprivoisée au-delà des préjugés. L'objectif principal de ce MOOC est d'abord de vous amener à mieux vous connaître pour prévenir un éventuel déséquilibre que vous pourriez vivre à un moment ou à un autre de votre carrière. » Comment ? En se constituant pas à pas une sorte de 'boussole interne' pour garder le cap face aux vagues parfois scélérates de la profession.
12 points d'accréditation
L'idée a germé au sein du département de médecine générale, qui planchait sur l'épuisement et qui a répondu à un appel à projets du vice-rectorat à l'enseignement. « Chaque année, l'université lance un appel à ressources numériques, dont des MOOC's, pour les étudiants. Les enseignants montent un dossier, un certain nombre de projets peuvent ainsi être accompagnés et financés par l'université, qui offre un accompagnement technopédagogique, notamment pour les vidéos», détaille Céline Tonus.
« Nous avons eu la chance d'avoir le soutien d’Anne-Sophie Nyssen, la rectrice actuelle, vice-rectrice à l'enseignement et au bien-être, qui a toujours été intéressée par le bien-être des étudiants en général, et en médecine en particulier », souligne la Dre Lenoir. Si les Anglo-Saxons sont rompus à l'exercice du MOOC (à Stanford, notamment), il existe peu de ressources, côté francophone, pour aider les soignants à affronter le stress.
La démarche de l'ULiège était donc novatrice. Elle a été rejointe, depuis, par l'ULB, qui a lancé son propre MOOC intitulé « Cap sur le bien-être des professionnels de la santé ». « Cela prouve qu'il y a un réel besoin si on n'est pas les seuls à le faire ! Et c'est très bien, nos cours seront complémentaires », s'en réjouit Céline Tonus.
Le cours est gratuit et accessible à tous, il suffit de se créer un compte en ligne. Lors de sa phase test, il a rassemblé près de 3.000 personnes. L'accréditation a été demandée, à raison d'un point par heure de cours, soit 12 points au total.
Une boîte à outils
Concrètement, le MOOC est ouvert pendant toute l'année académique. Son contenu a été libéré d'un coup, il est donc d'ores et déjà disponible afin que chacun puisse se l'approprier quand et comment il préfère. Six modules rythment le cours, chacun représentant environ deux heures de travail, en commençant par fournir des clés pour mieux comprendre la mécanique du stress, tant aigu que chronique, ses conséquences et sa symptomatologie, et ainsi arriver à mettre des mots sur le ressenti ou le vécu.
Anne-Laure Lenoir conseille de faire les modules dans l'ordre présenté pour suivre la logique, et de préférence au rythme d'un module par semaine, histoire de laisser la matière décanter et s'imprégner dans le quotidien. « On voulait des formats très flexibles, sans séances en direct pour ne pas mettre d'obligation à être présent devant son écran à des heures précises. Tout est en ligne, pré-enregistré, avec des exercices. Un forum permet de poser des questions. »
« Le MOOC se veut une boîte-ressource où l'on va aller piocher les outils qui nous conviennent, dont on a besoin à un instant 'T' au cours de l'année », poursuit la Dre Lenoir, « il contient également des exercices corporels, des mises en situation et des pistes d'action. »
