Drépanocytose : une maladie encore trop méconnue en Belgique

A l’occasion de la Journée mondiale de la drépanocytose, l’hôpital Erasme (H.U.B) proposait un dépistage gratuit et sans rendez-vous dans son hall d’accueil. Une initiative saluée par les associations de patients, telle Esenca, alors que cette maladie génétique grave demeure largement ignorée du grand public comme de nombreux professionnels de santé.
La drépanocytose touche principalement les populations d’origine africaine, méditerranéenne, indienne et sud-américaine, mais elle est loin d’épargner l’Europe. En Belgique, c’est même la maladie génétique la plus répandue : un enfant sur 2.329 en est atteint. Héréditaire, elle provoque des douleurs aiguës, une anémie chronique et une vulnérabilité accrue aux infections. Pourtant, elle reste souvent mal diagnostiquée ou minimisée, comme le rappelle l’association Esenca.
« Trop de patients racontent que leur douleur est mise en doute à l’hôpital », déplore Odette Todo, assistante sociale chez Esenca. Elle pointe le manque de formation des soignants et l’existence persistante de préjugés raciaux, comme le “syndrome méditerranéen”, selon lequel les personnes afrodescendantes seraient supposées ressentir moins la douleur.
Depuis janvier 2023, un dépistage systématique de tous les nouveau-nés est organisé en Fédération Wallonie-Bruxelles, une avancée considérable selon Odette Todo. L'établissement d'un diagnostic précoce, avant l'apparition de symptômes, permet de réduire le risque de morbidité. Une unité d'hospitalisation dédiée aux adolescents et aux adultes atteints de drépanocytose a également ouvert ses portes en juin 2024, à l'hôpital Erasme.
En effet, pour inverser cette tendance, l’Hôpital Universitaire de Bruxelles mise désormais sur la prévention. Le dépistage pré-conceptionnel – simple, rapide et non invasif – permet d’identifier les porteurs sains et d’ouvrir un dialogue éclairé sur les risques de transmission. En cas de double portage chez les futurs parents, un accompagnement en procréation médicalement assistée (PMA) est proposé, avec notamment la possibilité d’un diagnostic préimplantatoire.
« La médecine n’impose rien, elle informe et accompagne », explique le Pr Martin Colard, hématologue. Un changement de cap majeur : sortir de l’urgence pour aller vers une prévention éthique, accessible et personnalisée.
En chiffres (sources : H.U.B.) :
À l’échelle mondiale: environ 300 000 nouveau-nés naissent chaque année avec la forme majeure de la drépanocytose dans le monde.
Portage discret : près de 5 % de la population mondiale porte au moins un gène de drépanocytose
Situation en Belgique : environ 1 naissance sur 2 329 présente la maladie ou son trait, selon les données issues de plus de 39 000 dépistages néonataux.