La mélatonine a des propriétés encore méconnues
Une revue de la littérature a comparé la mélatonine à la vitamine D en tant que complément alimentaire « à la mode ». Et plutôt à raison, comme le montrent notamment deux études récentes qui lui prêtent des propriétés allant au-delà de la correction des troubles du sommeil.
Comme le rappellent les auteurs de cette revue [1], la vitamine D et la mélatonine ont des effets étendus sur de multiples systèmes. Pas au point, cependant, de les qualifier de panacées : comme pour tout nutriment, il peut exister un large spectre de carences, d’excès, de toxicités ou de déséquilibres.
Tout comme la vitamine D, la mélatonine pourrait être considérée comme un nutriment alimentaire essentiel, certaines personnes nécessitant un ajustement personnalisé selon leur mode de vie ou différentes circonstances (par exemple, exposition à la lumière bleue artificielle la nuit, jet-lag, travail posté), sans compter la réponse métabolique ou les variantes génétiques au niveau des récepteurs de la mélatonine [2,3].
La mélatonine est une indolamine produite tant chez les plantes que chez les animaux. L’être humain la produit principalement à partir de tryptophane par la glande pinéale et les cellules entérochromaffines, et ils en consomment continuellement. La production de mélatonine et les rythmes circadiens ne se développent pas avant l’âge d’environ trois mois, mais les bébés allaités bénéficient de la mélatonine présente dans le lait maternel. Les taux augmentent jusqu’à l’adolescence, pour diminuer ensuite progressivement et se stabiliser autour de 10 à 20 pg/mL (voir figure).

Outre le vieillissement, la production de mélatonine peut être influencée par les maladies, l’alimentation, des facteurs environnementaux tels que la lumière vive la nuit, certains médicaments et le mode de vie. Actuellement, les plus grands contributeurs au déséquilibre de la mélatonine sont probablement le décalage horaire, le travail posté, la surexposition à la lumière artificielle nocturne (téléphones, ordinateurs, lumière fluorescente/LED) ou les perturbations du rythme circadien liées à des changements environnementaux ou saisonniers.
La mélatonine est appelée communément « l’hormone de l’obscurité », puisqu’elle est produite en réponse à l’obscurité telle que perçue par la rétine. D’un point de vue pratique et même clinique, la vitamine D et la mélatonine peuvent agir comme des capteurs biochimiques destinés à répondre respectivement aux besoins de lumière et d’obscurité.
Globalement, on pourrait ainsi supposer qu’un manque de vitamine D correspond à une « carence en lumière du soleil », de la même manière qu’une diminution de la sécrétion de mélatonine pourrait être liée à une « carence en obscurité. » Il pourrait même exister des niveaux d’interactions et de chevauchements entre les deux encore non entièrement élucidés, mais qui pourraient avoir un intérêt clinique. Par exemple, il a été démontré que la mélatonine peut se lier à plusieurs protéines cibles, notamment des enzymes, des récepteurs, des pores et des transporteurs.
La mélatonine pour améliorer la fonction cardiaque ?
Une méta-analyse s’est intéressée à la possibilité d’un effet bénéfique de la mélatonine sur l’évolution de l’insuffisance cardiaque [2]. Selon leurs critères stricts d’éligibilité, seuls quatre articles ont été retenus par les auteurs.
Les résultats de l’analyse ont montré une augmentation de la fraction d’éjection (différence moyenne : 2,39 ; p = 0,27), de la classe fonctionnelle NYHA (New York Heart Association - rapport de cotes : 4,84 ; p = 0,05) et une amélioration significative de la qualité de vie (différence moyenne : -5,95 ; p = 0,001). Sous l’effet de la mélatonine, la sensation de fatigue et le taux NT-Pro BNP ont diminué, tandis que la qualité du sommeil, l’appétit et la dilatation médiée par le flux (Flow-Mediated Dilation, FMD) ont significativement augmenté.
L’ensemble de ces études met en évidence des propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et immunomodulatrices prometteuses de la mélatonine.
Pour les auteurs (qui restent tout de même prudents au vu du nombre faible d’études de qualité à ce stade), la mélatonine, en améliorant les paramètres psychologiques et la fonction cardiaque, pourrait être considérée comme une nouvelle option utile dans le traitement des patients atteints d’insuffisance cardiaque.
Et plus largement ?
Une autre étude récente [3] visait à examiner la littérature récente sur la supplémentation en mélatonine et ses effets éventuels dans des domaines variés de la santé, comme l’obésité et le diabète. Un total de 71 articles ont été ainsi collectés et analysés.
L’ensemble de ces études met en évidence des propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et immunomodulatrices prometteuses de la mélatonine, en particulier pour améliorer la qualité du sommeil et dans certaines maladies neurodégénératives. Les données soutiennent également l’hypothèse d’un rôle bénéfique sur l’anxiété dans un contexte préopératoire et dans l’amélioration de la récupération chez les athlètes.
Références
1. Minich DM, Henning M, Darley C, Fahoum M, Schuler CB, Frame J. Is Melatonin the “Next Vitamin D”?: A Review of Emerging Science, Clinical Uses, Safety, and Dietary Supplements. Nutrients. 2022; 14(19):3934. doi: 10.3390/nu14193934
2. Daliri AS, Goudarzi N, Harati A, Kabir K. Melatonin as a Novel Drug to Improve Cardiac Function and Quality of Life in Heart Failure Patients: A Systematic Review and Meta-Analysis. Clin Cardiol. 2025 Mar;48(3):e70107. doi: 10.1002/clc.70107
3. Minari TP, Pisani LP. Melatonin supplementation: new insights into health and disease. Sleep Breath. 2025 Apr 25;29(2):169. doi: 10.1007/s11325-025-03331-1
4. Grivas TB, Savvidou OD. Melatonin the "light of night" in human biology and adolescent idiopathic scoliosis. Scoliosis 2, 6 (2007). doi: 10.1186/1748-7161-2-6