Invalidité de longue durée
Syndicats et associations de patients vent debout contre Vandenbroucke et son projet de contrôle
L'annonce du ministre de la Santé, samedi via la presse quotidienne, de sa volonté de soumettre les patients en invalidité depuis plus d'un an à un nouvel examen médical avant que leur allocation ne soit prolongée, a fait l'effet d'une bombe auprès des syndicats et des associations de patients...

Une "petite révolution" qualifie lui-même Frank Vandenbroucke sa nouvelle idée: soumettre les personnes en invalidité depuis plus d'un an (puis chaque année) à un examen médical "de nihilo" avant de prolonger (ou pas) leur allocation. Le ministre ne croyait pas si bien dire: son idée suscite (évidemment) un tollé auprès des syndicats et des associations de patients...
CSC: accorder plus d'attention à la prévention des maladies professionnelles
Le projet du ministre ne doit pas conduire à déclarer trop rapidement les personnes en bonne santé dans le seul but de nettoyer la liste des malades de longue durée, puis de les pousser vers le CPAS, prévient la CSC.
En outre, ces contrôles seraient "vraiment inappropriés" dans le cadre d'un traitement lourd comme celui contre le cancer, par exemple, avertit encore le syndicat chrétien qui constate, à travers ses services, que de nombreux travailleurs en invalidité aimeraient retourner au travail.
La CSC souligne par ailleurs le manque de plan visant à prévenir le travail nuisible à la santé: "Y aura-t-il des contrôles et des sanctions adéquats dans les entreprises? Et comment allons-nous inciter les entreprises à proposer des emplois adaptés? Ce qui est crucial."
La plateforme flamande de patients ne décolère pas
« Nous ne sommes pas contents, nous sommes même assez en colère », a déclaré de son côté Eline Bruneel, de Het Vlaams Patiëntenplatform, plateforme de patients qui chapeaute pas moins de 125 associations de patients au Nord du pays.
« D'un côté, c'est bien que les personnes atteintes d'une maladie chronique ne soient pas oubliées, mais de l'autre, cela donne l'impression que le problème vient d'elles alors que ces personnes veulent vraiment travailler. »
Selon Mme Bruneel, c'est la énième fois que ce groupe cible est visé. Cette mesure suscite énormément d'inquiétude et de stress, alors que de nombreuses personnes souffrant d'une maladie de longue durée ont déjà beaucoup de mal.
Vandenbroucke: "Repartir de zéro"
Selon le ministre de la Santé, près de 300.000 Belges sont aujourd'hui en maladie de longue durée jusqu'à leur retraite. Pour endiguer ce problème croissant, Frank Vandenbroucke voudrait que toute personne qui perçoit une allocation d'invalidité depuis plus d'un an doive introduire une nouvelle demande médicale pour pouvoir prolonger cette allocation.
"L'évaluation du potentiel de travail doit repartir de zéro, sur la base de l'évaluation médicale effectuée par un médecin", explique-t-il dans les colonnes de De Standaard et de La Libre de ce samedi. Une évaluation qui serait ensuite renouvelée chaque année. Le projet ne concernerait pas les malades de longue durée totalement invalides, ni les patients qui suivent un traitement très lourd comme dans le cas du cancer. Le nouveau contrôle toucherait 100.000 patients sur les 300.000, même si les chiffres précis ne sont pas encore connus.
Les patients reconnus en invalidité totale et ceux en traitement lourd ne seraient pas concernés par la mesure
Cette potentielle réactivation des malades de longue durée - et donc la réduction des milliards dépensés en prestations maladie - pourrait constituer un coup de pouce financier important pour la Sécurité sociale belge: "À long terme, cela pourrait représenter une économie de plusieurs centaines de millions d'euros pour la Sécurité sociale. Même si ce n'est pas ma première préoccupation", ajoute le ministre Vooruit, qui rappelle dans La Libre que "pour l’exercice 2025, il manque en recettes 1,7 milliard d’euros."
Groen: "Le travail rend les gens malades"

Bart Dhondt, président de Groen, rejoint la réaction de la CSC, et plaide davantage pour un "travail plus sain".
"L'invalidité de longue durée constitue un problème majeur, je suis tout à fait d'accord avec le ministre sur ce point, mais la seule réponse que j'entends aujourd'hui de sa part, c'est d'intensifier les contrôles, je n'entends rien sur la cause du problème, à savoir que notre lieu de travail rend les gens malades. Parallèlement, avec ce gouvernement, les conditions de travail des gens continuent de se détériorer."
Idewe: inciter plutôt que punir
Lode Godderis, professeur de médecine du travail à la KU Leuven et CEO d'Idewe, service de prévention et de protection au travail, s'inquiète également, et plaide en faveur d'une approche plus positive et en lien avec ce que l'employeur peut offrir. L'approche actuelle est encore trop axée sur l'individu: "Il est important de ne pas seulement considérer ce que cette personne est encore capable de faire, mais aussi ce que l'employeur peut lui offrir. Ces deux aspects doivent être liés."
"Je suis d'accord que le travail peut contribuer au processus de guérison. Il aide également à sortir les gens de leur isolement social et est également positif d'un point de vue financier." Mais il s'inquiète lorsque l'objectif est atteint par le biais du "contrôle" et "lié à la perte des allocations".
"Contrôler n'est pas la même chose qu'accompagner. Le travail devrait également être considéré comme un objectif de santé, comme quelque chose de positif", explique-t-il, plaidant en faveur d'incitations plutôt que de sanctions.